L’altérité
L’être humain n’est pas un être solitaire, c’est dans
l’interaction avec les autres qu’il se développe, se construit et se définit.
Dès l’enfance, les êtres qui constituent l’environnement de la personne ont une
influence importante sur l’élaboration de son monde symbolique.
L’acquisition de la maturité psychique signifie la
capacité de devenir indépendant des influences extérieures pour élaborer une
symbolisation personnelle authentique, fonction de la subjectivité vécue au
travers de la liberté expérientielle. Le paradoxe, qui n’est qu’apparent, est
que la réalisation de l’autonomie subjective se fait grâce à l’altérité.
La vie authentiquement personnelle est co-présence,
dit Marcel, et le chemin de soi par soi passe par autrui ; c’est dans un
dialogue entre deux Toi que l’homme se découvre et s’affirme en tant que
personne. C’est pourquoi la psychothérapie s’offre comme un espace de découverte de soi, à condition que soit saisie
l’importance métaphysique qui doit être accordée à la rencontre.
Comme le dit Binswanger, il n’y a pas un malade et un
thérapeute, mais deux partenaires dans l’être- présent ou amour, un être-
ensemble qui porte les possibilités de l’avenir. Être, c’est être pour autrui,
c’est être reconnu souligne Hegel ; l’Autre est ce « grâce à quoi j’entre en
communication avec moi-même ».
La période de la dépendance, est la période infantile,
celle de l’indépendance, la période de la maturité ; l’une et l’autre sont
vécues à partir de la relation à l’autre car, pour reprendre les propos de
Mounier, l’expérience de la personne n’est pas une affirmation solitaire, mais
une activité d’auto- création et de communication ; « La personne n’existe que vers
autrui, elle ne se connaît que par autrui, elle ne se trouve qu’en autrui ». Si
Sartre nous dit que l’altérité est une opposition, que la relation à l’autre se
configure négativement, c’est parce que l’homme a le choix. Celui-ci peut
engendrer l’échec du rapport à autrui ou expérimenter qu’« être, c’est aimer ».
Aimer, dans le sens de l’échange basé sur le respect
de la spécificité d’autrui, de la reconnaissance de son irréductibilité, de sa
différence et d’une compréhension de son monde ; accepter que beaucoup de
façons d’être- soi sont possibles et sont vécues, afin de vivre la plénitude des possibilités d’être humaines ;
comme le dit Binswanger. La communication entre les êtres se configure en
fonction du rapport à soi-même ; pour être en capacité d’entendre l’autre et
accepter sa différence, il faut être en mesure de s’entendre soi-même,
c’est-à-dire connaître sa propre spécificité et l’accepter.
La psychothérapie se définie comme l’expérimentation
d’une nouvelle relation ; nouvelle car basée sur l’empathie, l’absence de
jugement et de conseils ; qui offre la possibilité de s’entendre vraiment du
plus profond de soi. C’est la raison pour laquelle la psychothérapie semble
pouvoir véritablement se définir comme telle, uniquement dans la mesure où elle
se configure ainsi. Pour comprendre l’autre, il est nécessaire d’être en capacité
de se comprendre soi-même. Le philosophe Gilles Lipovetsky avance que le
retrait sur soi-même, au lieu de nous éloigner d’autrui, nous en rapprocherait
; ce serait par la prise en considération de soi que l’individu pourrait «
s’ouvrir aux malheurs des autres ».
Hélène Bonsergen
source :http://www.psycho-ressources.com
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